J’ai déjà parlé du soleil se levant
au-dessus de la pierre de Hele le matin du Solstice d’été. L’édition de 1955 du
guide officiel de Stonehenge du ministère de travail précise qu’au cours de
l’année, chaque lever de soleil doit avoir un point de coucher du soleil
directement opposé et le point opposé du lever de soleil de la journée la plus
longue sera le point de coucher du soleil le jour le plus court, le solstice
d’hiver. A Stonehenge, à ce moment, un observateur se tenant au centre verra le
soleil se placer juste à la gauche de la pierre la plus grande, derrière
l’autel, c’est-à-dire le montant restant du grand trilithe central, dont l’autre
pierre et le linteau sont tombés.
On calcule donc que si la pierre centrale, qui est maintenant tombée du fer à
cheval de la Pierre Bleu, était de la même taille que ses voisines, le lever du
soleil le jour du solstice d’hiver serait apparu exactement au-dessus d’elle et
aurait été encadré par les pierres du grand trilithe.
John Abercromby, dans son livre de 1912 sur la poterie de l’Age de Bronze, a
attiré l’attention sur le fait que dans aucune religion ou temple une personne
n’entrait par une porte, faisait quelques pas dans un bâtiment, puis se
retournait vers l’entrée pour faire face au lieu principal du culte. A
Stonehenge, l’entrée est située au nord-est, ainsi si le lieu le plus sacré est
le point où se lève le soleil, il faut tourner le dos à l’autel au sud-ouest
pour le regarder. John Abercromby propose donc qu’à Stonehenge la grande fête
avait lieu à l’occasion du Solstice d’Hiver, au lever du soleil, le jour où,
symboliquement, il « trépassait ». Il semblait encadré par le grand trilithe,
au-dessus de l’autel. L’auteur du guide officiel, R. S. Newall, suggère que le
trilithe représente la porte de l’Autre Monde, là où le soleil se rend lors du
solstice d’hiver.
Il s’agit là d’une observation importante, mais le trilithe a une autre
signification en plus d’être la porte vers le Pays des Morts. Dans son livre
très intéressant « The Great Mother : An Exploration of the Archetype », Erich
Neuman, un élève de C. G. Jung, présente dans l’art antique un certain nombre de
représentations de la porte, du passage ou du trilithe, comme symbole de la
Grande Mère, la Déesse de qui renaît, le dieu-soleil. Ainsi, l’apparition du
disque rouge du soleil qui se lève, rougeoyant entre les pierres herculéennes du
grand trilithe au crépuscule en hiver, symbolisait autrefois la mort, mais aussi
la promesse de la renaissance, peut être même pour l’homme comme pour le soleil,
des entrailles de la Grande Mère.
J’ai décrit dans « Witchcraft Today » mon livre précédent, comment, lors du
Solstice d’Hiver, les sorcières pratiquent secrètement aujourd’hui un rituel où
l’on retrouve exactement la même idée. La prêtresse, ou le leader féminin, du
coven se tient derrière un chaudron où un feu a été allumé, pendant que les
autres font une ronde dans le sens du soleil avec des torches allumées. Ils
appellent cela la Danse de la Roue ou de Yule et son but est de « causer la
renaissance du soleil ». Ici le chaudron symbolise la même idée que la « porte
», la Grande Mère. Le feu est l’Enfant-Soleil qui est dans ses entrailles.
Il y a un autre ancien monument caractéristique de l’imagerie «
masculine-féminine » c’est le Men-an-Tol dont le nom signifie « Pierre avec un
Trou » non loin de Penzance en Cornouailles. Il a été déplacé de son emplacement
original mais il se compose toujours de deux pierres dressées entre lesquelles
il y a une grosse pierre au centre de laquelle un trou a été soigneusement
creusé, un trou assez grand pour qu’un être humain puisse y passer en rampant.
La signification sexuelle de ce groupe de pierres est évidente et le débitage
soigneux de la pierre centrale doit avoir demandé énormément de travail vu les
outils dont on disposait à l’époque. Les pierres sont toujours vénérées en
Cornouailles et une vieille coutume veut que les gens amènent leurs enfants à la
pierre trouée du Men-an-Tol et les fassent passer par son orifice « pour la
chance » ou pour les guérir de maladies infantiles, notamment du rachitisme.
Il y a une légende persistante, à laquelle faisait souvent autrefois référence
la littérature anglaise, selon laquelle lorsque la ville de Troie est tombée, un
certain nombre ses princes et leur cour se sont réfugiés en Europe de l’Ouest,
en particulier Brutus, l’arrière-petit-fils d’Enée, et se sont implantés en
Grande-Bretagne et ont fondé une ville qui est maintenant Londres. L’ancien nom
poétique de Londres est Trinovantum, la nouvelle Troie. Le poète Humphrey
Gitford (vers 1580) a qualifié les jeunes hommes de Grande-Bretagne de «
rejetons du pays de Brutus » lorsqu’il les a invités à résister à l’Armada
espagnole. Quand, plus tard, on a cru que Troie était une cité purement
légendaire, on s’est moqué de cette vieille histoire, mais la recherche
archéologique moderne lui a donné un nouveau souffle de vie.
wica wicca Gerald Gardner