Qui étaient les Dieux de Grande-Bretagne? (5)
par Gerald Gardner (traduction Ameth)
Dans la Légende Magique des Sorcières, que j’ai donnée dans « Witchcraft Today », l’Ancien Dieu explique à la Déesse que l’Age et le Destin (c’est-à-dire le Karma) contre lesquels il est impuissant (car ce sont des Lois Cosmiques) font que toutes les choses dépérissent et meurent, « Mais lorsque les hommes meurent à la fin des temps, je leur donne repos, paix et force pour qu’ils puissent revenir », c’est à dire renaître sur la terre, se réincarner.
On retrouve peut être ces deux aspects de l’Ancien Dieu dans deux des plus célèbres géoglyphes des campagnes anglaises. « Le Géant de Cerne » gravé sur la colline à Cerne Abbas dans le Dorset, a un phallus en érection et avec sa massue dressée vers le ciel (un autre symbole phallique), il est représenté en Dieu de la Fertilité et il est toujours considéré comme tel par la population locale. On dit que si une femme sans enfant souhaite être féconde, elle peut le devenir en passant une nuit couchée sur le phallus du Géant à la bonne période de l’année et une histoire raconte que lorsqu’un membre du clergé local a été indigné par l’aspect réaliste du Géant, et, étant incapable de lui imposer le port de la culotte, il a proposé qu’une partie de l’anatomie du Géant qu’il ne voulait pas voir soit labourée. L’indignation de la population locale l’a empêché de mener à bien son projet. Heureusement, le Géant de Cerne a aujourd’hui été classé et il est, nous l’espérons, à l’abri de tels actes de vandalisme.
Il y a une autre histoire liée à Cerne. Vers l’époque de la première Guerre Mondiale une communauté de religieuses est venue y habiter et elles ont été choquées par la vue du sexe dressé de l’Ancien Dieu impudique. Alors la mère supérieure leur a ordonné d’aller sur la colline avec des brocs d’eau bénite et d’asperger cette œuvre du Diable pour exorciser son influence perturbatrice. A leur retour, lorsqu’elles sont passées par le village, on leur a dit : « Cela ne sert rien d’aller là haut en ce moment de l’année. Vous devez y en mai si vous voulez des bébés.»
L’autre personnage est, bien sûr, « Le Grand Homme de Wilmington » dans le Sussex. Ce personnage a été retracé à la fin de l’époque victorienne, il avait été envahi par la végétation et ses contours n’étaient plus visibles que lorsqu’il y avait de la rosée ou du givre sur l’herbe. Toutefois, lorsque vers la fin du siècle dernier il y a eu un regain d’intérêt pour l’archéologie, le personnage a été retracé grâce l’insistance du Dr. J. S. Phené. Naturellement, à cette époque, ils n’ont pas gravé « Le Grand Homme » de façon aussi réaliste que le Géant de Cerne ! Mais, à part cela, je pense que les contours ont été suivis de la façon la plus fidèle possible.
Le personnage apparaît comme d’habitude sur une colline. Cette fois avec les bras tendus, il semble tenir deux longs bâtons. Sir Flinders Petrie pensait qu’il aurait pu représenter le Dieu-Soleil ouvrant les portes de l’aube. Je pense que Petrie devait être très près de la vérité et qu’il s’agit en réalité de l’Ancien Dieu, Seigneur des Portes de la Mort.
Au moment où j’écris ces lignes, des traces d’autres personnages « gigantesques » gravés dans le sol sur les pentes des collines de Gogmagog à Wandlebury, à quelques kilomètres de Cambridge ont été trouvées par M. Thomas Charles Lethbridge, Gardien Honoraire des Antiquités Anglo-Saxons au Musée Universitaire de Cambridge. L’examen de ce site vient tout juste de débuter et il faudra un certain temps avant que l’on puisse avoir de conclusion définitive à ce sujet mais on a déjà mis à jour suffisamment de traces pour montrer que l’un des personnages est une Déesse nue. Au nord de ce personnage, au sommet de la colline, il y a un ancien talus de terre dont le professeur Grahame Clarke du Département d’Archéologie de Cambridge pense qu’il s’y déroulait peut-être des rites de fertilité, dont ils survivaient apparemment des traces jusqu’à l’époque Elisabéthaine, puisqu’à cette époque un édit de l’Université interdisait aux élèves d’assister aux festivités de Wandlebury. Quelque chose de semblable se passait à Cerne, où il y a un petit talus en haut de la colline, juste au-dessus du personnage, localement on l’appelle la « Poelle à Frire Géante ». C’est là qu’était dressé le Mat de Mai jusqu’à ce que Cromwell et ses puritains mettent un terme à ces festivités. Il est très probable que ce personnage représente une ancienne Déesse Britannique et j’ai l’impression que près de ce personnage, au-dessus de sa tête, on a retrouvé une forme de croissant de lune et à côté d’elle il y a une partie d’un cheval ou d’un autre animal. La Lune serait, bien sûr, un lien évident avec la Déesse Mère. Il y a sans doute d’autres personnages de ce type existant dans les Iles Britanniques que les techniques modernes d’archéologie, en particulier la photographie aérienne, pourront encore découvrir et grâce auxquelles nous allons en apprendre davantage sur nos Anciens Dieux.
Une représentation néolithique remarquable de la Grande Mère a été trouvée dans le Norfolk dans la vieille mine de silex appelée Tombe de Grime. Dans leur livre « Prehistoric Britain », Jacquetta et Christopher Hawkes la décrivent ainsi:
Trônant sur une bordure, le dessin gravé dans la craie représente une femme grosse et enceinte, les yeux baissés regardant un phallus, également gravé dans la craie, et un grand tas de bois cerfs qui avait été placé là en offrandes à ses pieds. Il y avait là un sanctuaire d’un culte de la fertilité mais qui semblait apparemment servir un but curieux et inattendu. Cette forme particulière n’était d’habitude pas placée sur un lit de silex et on peut raisonnablement supposer que le sanctuaire a été créé pour lutter contre la stérilité de mine et assurer l’abondance de la prochaine. Mais ce n’était là, dans un contexte minier, qu’une manifestation du culte de la fertilité tel que le pratiquaient les peuples du néolithique – des statuettes féminines et phalliques ont été trouvées dans plusieurs camps du néolithique et dans une tombe, où des rites étaient vraisemblablement pratiqués dans des buts plus biologiques - la fécondité des hommes et des animaux.
On retrouve exactement le même concept
chez les sorcières d’aujourd'hui. Leur Déesse est la Mère de la Fertilité sous
toutes ses formes, qu’il s’agisse de la fertilité de la terre, du bétail, des
humains ou de la prospérité matérielle de certaines actions ou encore celles de
formes plus subtiles de la fécondité qui germent dans l’esprit et engendrent la
poésie et les arts. Cerridwen était l’un des noms celtiques de la Déesse et l’on
retrouve ce nom dans des noms de lieux comme New Liskeard, en Cornouailles, qui
est « Lys Cerrid » la Cour de Cerrid. Dans la mythologie bardique c’est elle qui
possédait le Chaudron Magique dans lequel a été brassée « l’Awen », la Potion
d’Inspiration et dans lequel des vieillards retrouvaient la jeunesse. Au fil du
temps ce Chaudron s’est christianisé et est devenu le Saint-Graal. Un grand
écart de temps sépare la Grande Mère de la Tombe de Grime et la Dame Blanche des
Bardes, mais l’archétype est le même. Son « Chaudron » est la Matrice de la
Déesse, la Mère et l’Amante de tous les hommes, car elle incarne potentiellement
toutes les femmes.
wica wicca Gerald Gardner