Pourquoi ? (9)

par Gerald Gardner (traduction Ameth)

Il est curieux qu’à cette époque les sorcières étaient considérées comme une classe ou une profession. Depuis « l’époque des bûchers », les sorcières ont toujours fait leur possible pour être discrètes mais avant les buchers c’était différent, avant le début du règne de la loi du lynchage ecclésiastique, la plupart d’entre elles étaient, comme de nos jours, des femmes mariées et heureuses en ménage. Elles avaient un statut distinct et étaient respectées et craintes quelque peu, mais elles étaient aussi appréciées pour les services qu’elles rendaient à la collectivité comme médecins, sages-femmes et barreuses de maux en général.

Le curé du village était souvent considéré de la même façon, il pouvait ennuyer les gens avec la dîme, il était lui aussi sans aucun doute une influence positive et ils participaient de temps à autres eux aussi aux rites de l’Ancienne Religion comme c’était le cas du prêtre du village d’Inverkeithing en 1282 ou des prêtres basques au sujet desquels De Lancre a écrit en 1613. Ce sont les moines des abbayes qui ne faisaient jamais quoi que ce soit pour le bien des gens des campagnes, qui étaient détestés. Ils venaient très souvent récolter la dîme, en prenant des choses par la force sans jamais rien donner en retour ce qui a fait que l’Eglise était détestée. Elle était aussi détestée pour ses attaques contre les femmes « raisonnables », c'est-à-dire celles qui n’entraient pas dans les catégories bourgeoise-épouse-ménagère, épouses, domestiques, paysannes ou religieuses. L’Eglise pensait que les femmes devaient élever de nombreux enfants qui seraient moines et nonnes et suffisamment d’autres qui se mariaient pour perpétuer la race, ou alors elles devaient être religieuses et tout abandonner.

Comme l’a dit Simone de Beauvoir dans « Le Deuxième Sexe » :

C’est le christianisme, qui investit les femmes d’un nouveau prestige effrayant, la peur de l’autre sexe est l’une des formes prises par l’angoisse de la conscience désorientée de l’homme... Le Mal est une réalité absolue et la chair est péché. Et, bien sûr, comme la femme est toujours « l’Autre », il n’est pas considéré que les hommes et les femmes sont de chair, pour le chrétien la chair c’est « l’Autre » qui est hostile – le femme plus précisément. En elle le chrétien trouve l’incarnation de la tentation du monde, la chair et le diable. Tous les pères de l’Eglise insistent sur l’idée qu’elle a poussé Adam au péché. Il faut citer Tertullien (à la fin du 2ème siècle après JC) : « Femme ! Tu es la porte du diable. Tu persuades celui que le diable n’ose pas attaquer directement. A cause de toi le Fils de Dieu a dû mourir. Tu devrais toujours être vêtu de vêtements de deuil et de guenilles »... La littérature chrétienne, s’efforce d’amplifier le dégoût que la femme peut inspirer à l’homme.

Tertullien la définit comme « un temple bâti sur un égout ».... Saint-Augustin (354-430 après JC) a attiré l’attention avec horreur sur l’obscène proximité entre les organes sexuels et excréteurs : « Inter faeces et urinam mascimur ». C'est-à-dire : « Nous naissons entre les fèces et l’urine ».

De nombreux théologiens ont considéré (et il semblerait d’ailleurs que certains le font toujours) que le péché originel est imbriqué dans la loi de reproduction : « La concupiscence est un vice… la chair humaine est née du péché de chair. L’union des sexes transmet le péché originel à l’enfant, depuis de Chute, il est donc accompagné par la concupiscence. » (St. Augustin).

Certains des disciples de St. Augustin ont même dit que le Tout-Puissant a eu tort de commander à Adam « soyez fécond et multipliez-vous » par les moyens prévus, et que le péché d’Adam réside dans l’obéissance à la volonté du Tout-Puissant, ce qui suggère que si Adam avait eu la délicatesse de refuser de devoir se plier à ces méthodes dégoûtantes, le Tout-Puissant aurait été obligé d’inventer une manière plus décente d’accomplir ses plans. L’Eglise n’a curieusement jamais eu de problème pour dire que le Grand Architecte de l’Univers connaissait Son travail.

Comme l’Eglise a été influencée par des gens ayant cette mentalité, on peut comprendre le « Pourquoi » de bon nombre de ses actions. D’autre part, lorsque le culte des sorcières considérait St. Augustin comme étant un vieil homme à l’esprit singulièrement méchant et croyait au projet divin et à la sainteté de son Dieu Cornu et Phallique et de Sa compagne la Déesse Lunaire, on peut aussi comprendre le « Pourquoi » de ses croyances et actions et l’origine des siècles de conflit entre l’Eglise et le culte des sorcières, conflit qui n’est toujours pas résolu.


 

   

 

 

 

 

 

 

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