Lucius raconte un certain nombre
d’histoires macabres sur les pouvoirs des sorcières de son époque. Ce ne sont
pourtant pas des suppôts de Satan, Lucius n’en a jamais entendu parler. Leur
déesse est Hécate et Hécate, dans la vision qui délivre Lucius du charme, est
dite être comparable à Isis, la belle et plaisante Reine du Ciel. Elle est donc
la même déesse dans ses aspects sombres et de lumière, ce qui est normal pour
une déesse de la lune.
Il est notable que dans « Macbeth » de Shakespeare, les trois fameuses sorcières
invoquent Hécate en tant que maîtresse de leurs charmes. Il n’y a aucun
« Satanisme » là dedans. « Papus » (Dr. Gérard Encausse), dans son « Traité de
Magie Pratique » (Paris, 1893), cite dans un appendice sur la « Magie des
Campagnes » entre autres choses un texte qui de toute évidence provient du Grand
Albert et d’autres livres du même genre. Il s’agit d’un charme extraordinaire
qui, s’il est authentique (malheureusement il ne cite pas sa source), est une
illustration étonnante du mélange de vieilles pratiques païennes à du
christianisme, une invocation à Hécate lors de la pleine lune mêlée à des rites
d’Eglise :
Evocation.
Pendant neuf jours entiers, alors que la lune est à son croissant, après son cinquième jour, brûlez de l’encens en l’honneur des puissances protectrices des âmes souffrantes, récitez à chaque fois un Pater seulement pour le repos de ces mêmes âmes et brûlez à cette même intention une chandelle en l’honneur des esprits protecteurs des âmes souffrantes pour leur propre repos dans l’intention que vous avez.
De temps à autre brûlez l’encens en l'honneur des génies dans ce but.
Trois soirs de suite, la nuit (éviter vendredi), allumer du feu, faire trois tours afin de décrire mentalement un cercle. Prendre l’encens en main, le jeter dans le feu en pensant ou implorant Hécate (déesse des enchantements), puis, revenant dans ce cercle et se plaçant au milieu et implorant l’appui des astres du regard et de la pensée, on dit : « O Hécate, déesse dans les cieux, déesse sur la terre et Proserpine aux enfers, ô mère des ombres, reine suprême de l'armée des morts, ne lance pas contre moi tes légions, ô Hécate, fait plutôt qu’elles me servent. O triple Hécate, grande déesse qui préside aux enchantements, dans ce feu qui t’est offert, l’encens va brûler en ton honneur, ô Hécate, que ta divinité vienne à moi, que ta puissance m’environne, mon père (le ciel) n’en sera point offensé !
Par Hécate, ô génies matières des airs, par Hécate, âmes souffrantes des morts, par Hécate, ô âmes agitées de la région basse, par Hécate, devenez mes aides, mes leviers, mon armée !
Puis, quittant le cercle, vous prenez de l’encens dans votre main pour l’offrir aux génies, et vous formulez votre demande.
Après, vous brûlez du pain et du vin à l’intention des âmes souffrantes en général, et quand c’est fait, vous dites : « Par Hécate, j’ai dans le silence des nuits appelé les légions des airs, l’armée faste de la Bonne Déesse : aux uns j’ai offert l’encens qui les flatte, aux autres le pain dont ils sont affamés. Aussi, pendant que, puissants les astres brillent, que les Forces appelées agissent, comme un souverain en son manteau de pourpre, ton serviteur, ô Hécate, va s’endormir dans la confiance.
On a donné à ce rituel un vernis de christianisme en utilisant le Notre Père et en précisant dans l’invocation : « mon père dans le Ciel n’en sera point offensé ! », mais on voit la déesse sorcière comme celle qui dirige « les âmes souffrantes », c'est-à-dire les âmes du Purgatoire, qui est conçu comme une sorte de région intermédiaire, d’où les âmes peuvent revoir la terre. Le mot que j’ai traduit par « la Bonne Déesse » est « Obs » dans le texte original, cela sonne comme une version altérée de « Ops », la déesse de la terre et de la fécondité, l’épouse de Saturne, mais on peut aussi faire le lien avec le culte d’Obi en Afrique. La déesse qui était la gardienne de la graine cachée dans la terre, dans bien des anciens Mystères, elle était aussi la gardienne des morts qui promet l’immortalité et la renaissance qui fut symbolisée par la renaissance du blé chaque année. On remarquera que si le sort est pratiqué comme il est dit, pendant neuf jours quand la lune croit en lumière, après le cinquième jour, il sera pratiqué à la pleine lune. Ce fut le moment traditionnel pour l’Ebat local, lorsque le pouvoir de la déesse -lune était à son apogée.
wica wicca Gerald Gardner