Les Sorcières et les Anciens Mystères

par Gerald Gardner (traduction Ameth)

 

Les peintures murales contiennent la réponse à nos questions, car elles s'étendent sur tous les murs du hall malgré les angles et les ouvertures. On y voit vingt-neuf personnages, presque de taille réelle, habillés à la mode grecque et ressemblant aux peintures Attiques de la seconde moitié du cinquième siècle avant notre ère.
Il est évident que nous sommes en présence d’un seul événement, divisé en plusieurs épisodes, racontant l'histoire d'une femme drapée qui réapparaît dans tous les épisodes. L'histoire consiste en une série de cérémonies liturgiques où la femme est initiée aux Mystères Orphiques et ne fait plus qu’un avec Zagrée.
1. La liturgie commence par une jeune fille qui fait sa toilette nuptiale dirigée par une prêtresse. Elle est assistée par un préposé et deux jeunes garçons, dont un qui tient un miroir devant elle. Elle est drapée dans un sindon, un voile rituel qui était placé sur les néophytes lors des mystères. Elle est la jeune mariée mystique, la catéchumène se préparant à célébrer, en un mariage symbolique, sa communion avec Dionysos. C'est elle qui sera la protagoniste de toute la liturgie.
2. Drapée dans le sindon, la jeune fille s'approche respectueusement d'un jeune homme nu. On voit qu’il est prêtre, car il porte les hautes bottines Dionysiaques. Le prêtre, sous les tendres conseils d'une prêtresse, lit une charge ou un rituel sur un rouleau, afin que la néophyte comprennent les règles ou, peut-être, la signification de l'initiation.
3. Ainsi instruite et maintenant autorisée à prendre part au rite, la jeune fille, toujours drapée de son sindon, porte maintenant une couronne de myrte. Elle se dirige vers la droite vers un plat rituel et se prépare à un repas lustral. Devant une table de sacrifice, une prêtresse est aidée par deux préposés. De sa main gauche, elle découvre un plat apporté par un préposé et de sa main droite elle tient une branche de myrte alors que l'autre préposé, qui a placé dans sa ceinture un rouleau rituel, verse une libation au moyen d'un oenochoé. C'est l’agape lustrale qui doit être célébré avant la communion, comme c’était la tradition dans le Christianisme primitif.
4. Après la célébration de l’agape, la néophyte est jugé digne d'une nouvelle naissance, représentée allégoriquement.
Un couple de Satyres est assis. Un faon est allongé la gueule tournée vers la Satyre qui lui offre son sein, à sa gauche le Vieux Silène regarde la scène en jouant de sa lyre avec extase. Dans le mythe, l'enfant Dionysos a été transformé en un autre enfant pour le dissimuler de la colère de Héra.
Cet enfant que l'on allaite symbolise la petite enfance de Dionysos et Silène est présent, car il doit être le mentor du dieu ; la scène représente symboliquement la nouvelle naissance de la néophyte.
On la revoit sous la forme de Zagrée enfant ; on en trouve l’explication sur les tablettes d'or enterrées avec les initiés à Sybaris ; c’est l'âme du mort qui apparaît devant Perséphone et qui dit : « je suis né à nouveau ».
5. La néophyte est né une nouvelle fois en Zagrée, elle a commencé à vivre la vie du dieu, mais des épreuves terribles l'attendent. Silène est assis et lui montre une sphère d'argent vers laquelle un jeune homme regarde avec extase tandis que son compagnon porte bien haut un masque Dionysiaque. Silène se retourne vers la néophyte que l’on reconnaît à son sindon et lui dit des mots qui la remplissent visiblement de terreur.
Elle regarde vers l’arrière comme si elle voulait fuir et fait le geste de celle qui chasserait de sa vue une vision épouvantable. La sphère que regarde fixement le jeune homme avec extase est un miroir magique, il est fasciné et tombe dans une transe hallucinatoire et, comme cela arrive lorsqu’on regarde dans une boule de cristal, il voit dans le miroir une série de visions qui sont axées sur le masque et la vie de Dionysos.
Il se voit dans le miroir vivre la vie du dieu, voit comme il fut mis en pièces et dévoré par les Titans et, en bref, voit le futur destin de la néophyte, qui, si elle veut naître à nouveau et être autre, doit mourir avec Zagrée. C'est cette effrayante mort Dionysiaque qu'il annonce à la jeune fille.
C'est une divination animée et c'est Silène, tout d'abord mentor puis mystagogue de Dionysos, qui l’encourage. En plus de l'annonce de la mort future de la néophyte, cette scène montre le geste le plus important attribué au dieu par le mythe.
Dionysos lorsqu’il était enfant a regardé dans un miroir magique, fabriqué pour lui par Héphaïstos et y a vu son destin futur.
Une autre tradition raconte que les Titans ont assassiné Zagrée en lui montrant dans un miroir son propre visage déformé. C’est ainsi, en distrayant son attention, qu’ils l'ont tué. Comme le drame sacramentel consistait dans la répétition des actions du dieu pour communier avec lui en l’imitant, cela explique pourquoi la néophyte, ou le jeune homme, regarde le miroir comme Dionysos l’a fait afin de devenir comme Dionysos et de mourir avec lui.
6. La néophyte, après avoir reçu l'annonce, deviendra maintenant la jeune épouse mystique de Dionysos et, pour signifier symboliquement ce mariage, elle est sur le point de découvrir un phallus énorme qui se trouve dans un panier sacré. Elle le place sur le sol et semble humblement solliciter le consentement d'une personne ailée et à moitié nue, chaussée avec des bottes Dionysiaque, un rouleau rituel à la ceinture et une baguette à la main. C'est Talate, la fille de Dionysos, elle le représente et initie.
7. Talate est debout, elle lève la main qui tient la baguette pendant que la jeune fille s’agenouille abasourdie et terrifiée. Son visage est presque caché dans les genoux d'une prêtresse compatissante et elle endure la flagellation rituelle qui remplace et symbolise la mort. Physiquement elle ne meurt pas, mais elle passe symboliquement par la mort et meurt de façon mystique, comme le stigmatisé meurt crucifié en Christ.
8. Mort avec Zagreus, elle est maintenant née à nouveau avec lui ; c'est-à-dire elle est devenue bacchante et n'est plus une femme, mais un être humain divin. Nous la voyons maintenant danser nue frénétiquement. Elle est aidée par une prêtresse qui tient le Thyrsus, le symbole de la nouvelle vie Dionysiaque. L'esprit de Dionysos est descendu sur elle. L'homme est devenu Dieu et Dionysos a assisté invisible au miracle.
Nous le voyons entre la cinquième et la sixième scène, à moitié allongé sur les genoux Koré, un pied déchaussé selon le rite, regardant avec l'indifférence divine tout ce que l'homme peut subir pour lui. Voilà le mystère.
 


 

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