Pensée Magique (8)

par Gerald Gardner (traduction Ameth)

 

La sinistre Reine Catherine de Médicis (qui fut responsable du massacre des protestants à la veille de la St. Barthélemy) était connue pour son intérêt pour les arts occultes. On a murmuré que son fils préféré, le Roi Henri III de la France, se passionnait pour la magie noire. Il peut s’agir, naturellement, que d’une simple rumeur diffusée pour des raisons politiques afin de l’attaquer car il était très impopulaire, mais il semble tout à fait probable que la Reine Catherine lui ait réellement enseigné ses pratiques occultes et qu’après sa mort ses curieux instruments magiques ont été exhibés publiquement.
Il a été par la suite assassiné et remplacé par Henri IV, un prince qui prenait la vie et la religion de façon plus légère que la Reine Catherine ou son fils. Il était tout d’abord protestant mais comme on lui avait conseillé de changer de religion pour être accepté comme roi il a crié : « Paris vaut la peine une Messe » et il s’est converti. Mais lui aussi fut assassiné, laissant un fils, Louis XIII, toujours mineur, et sa reine, Marie de Médicis, qui a régné comme Régente. Une fois encore l’ombre de la sorcellerie s’est abattue sur la Maison Royale Française. La Régente, au grand désespoir de la noblesse, est tombée sous la coupe de deux aventuriers italiens, Léonora Galigaï et son mari Concini, pour qui Léonora, la plus forte personnalité des deux, n’a pas perdu de temps pour obtenir le titre de Maréchal D'Ancre. Léonora, alors qu’elle n’était officiellement que Dame de Compagnie de la Reine, exerçait une telle influence sur la Reine qu’elle et son mari régnaient pratiquement sur la France et qu’ils ont amassé une fortune considérable. Elle semble avoir été l’une de ces personnes étranges qui, comme Raspoutine, possédaient le pouvoir d’exercer une sorte de charme hypnotique sur les autres. Rapidement son mari Concini fut couvert d’honneurs, alors que le roi de seize ans était pratiquement maintenu en captivité. Comme pour Raspoutine on a prétendu que Léonora pratiquait la magie noire et c’est ce qui lui donnait cet ascendant extraordinaire sur la Reine.
Le jeune roi, désespéré, a conspiré avec certains de ses nobles pour assassiner Concini, et l’un d’entre eux a tué le Maréchal. Il fut inhumé à la hâte, mais la foule de Paris, qui le détestait à cause de ses excès a déterré son corps et l’a accroché sur le gibet que Concini avait fait ériger sur le Pont Neuf pour intimider tous ceux qui essayaient de s’opposer à lui. La fureur contre le Maréchal était si grande qu’après l’avoir pendu symboliquement son corps fut dépecé et les morceaux ont été vendus à tous ceux qui souhaitaient en acheter. Voilà une explication pour cette scène d’horreur macabre, mais on disait que Concini était un puissant sorcier, on pensait que de telles reliques infâmes possédaient en elles-mêmes des vertus magiques.
Le roi, ayant retrouvé sa liberté, a envoyé une compagnie d’archers pour arrêter Léonora Galigaï et la mener à la Bastille. Elle a été jugée et accusée de sorcellerie. On a dit qu’on avait trouvé des livres en Hébreu dans ses appartements (il s’agissait peut être de grimoires) et un de ses domestiques a dit qu’il l’avait accompagnée dans une église pour y sacrifier un jeune coq à minuit. Tout le monde était bien sûr contre la favorite déchue, mais il semble bien que la Maréchale s’était associée à un médecin juif italien nommé Montalo, qui fut un sorcier réputé, qu’elle consultait une diseuse de bonne aventure et qu’elle portait sur elle des charmes. Elle fut, bien sûr, déclarée coupable et condamnée à être décapitée et brûlée sur la place de Grève, le 8 juillet, 1617.
Sa réponse à l’accusation de sorcellerie est célèbre. « Mon sortilège » a-t-elle dit « a été le pouvoir que doivent avoir les âmes fortes sur les esprits faibles ». En voyant son portrait (et elle n’était franchement pas remarquable pour sa beauté ou l’expression de son visage), et en pensant à ces paroles, on se sent un peu navré pour la reine Marie de Médicis.
Dans « Gypsy Sorcery » p. 188 Leland dit « Il y a une forte tradition voulant que les Papes aient pratiqué la sorcellerie depuis le dixième siècle et que le Pape Sylvester II l’a admis sur son lit de mort ». Mais ici, comme tant d’auteurs, Leland ne fait pas la différence entre la magie cérémonielle et la sorcellerie proprement dite. Catherine de Médicis et Léonora Galigaï pratiquaient peut être la magie mais elles étaient de trop bonnes catholiques pour être des sorcières païennes. La magie cérémonielle, noire ou blanche, la magie des grimoires, est quelque chose de très différent de la sorcellerie et sous-entend des idées totalement différentes. Certaines de ces idées remontent à l’Egypte Antique et on peut en trouver des exemples dans les papyrus égyptiens, mais la forme sous laquelle elles étaient connues et pratiquées au Moyen-Âge était incontestablement d’optique et de phraséologie chrétienne. Mais, ce n’était là que des sorts dont ils donnaient une traduction, car ils étaient basés sur la tradition secrète Juive, la Kabbale. Expliquer ici les idées de cette grande tradition serait une tâche impossible. Il faudrait lui consacrer tout un livre mais on en trouvera de bonnes explications préliminaires dans « The Mystical Qabalah » de Dion Fortune et « The Kabalah Unveiled » de S. L. MacGregor Mathers. Rapidement on peut dire que la magie cérémonielle de ce type fonctionne sur l’idée que les esprits, mauvais ou bons, peuvent être commandés par la connaissance et l’utilisation de ces Noms Sacrés, de Dieu ou des anges et des archanges, auxquels cet esprit particulier est lié par la crainte et la vénération, en raison de son affinité occulte et de sa soumission envers eux. Quand des esprits mauvais sont évoqués, ils sont commandés et contraints par les Noms Sacrés de Dieu et doivent accomplir la volonté du magicien. D’où l’expression « un nom par lequel conjurer ». Le Mot « conjurer » signifie en réalité « jurer avec » ou « prêter serment avec ». Ce ne sont pas toujours des esprits mauvais qui sont appelés, mais néanmoins les êtres qui répondent à l’appel ou à la conjuration du magicien  sont généralement considérés comme étant au moins espiègles si ce n’est pire et le magicien est incité dans les grimoires, ou livres de magie, à se tenir dans un cercle autour duquel auront été inscrits des noms sacrés et des sigils, de sorte que le cercle constitue une sorte de forteresse astrale. Si une apparition visible de l’entité évoquée est désirée, alors un triangle est tracé à l’extérieur du cercle, et l’esprit est contraint d’apparaître dans le triangle. On voit souvent des représentations fantaisistes de magie cérémonielle où un magicien en tenue se tient en dehors du cercle et le démon ou l’esprit apparaît dans le cercle. Si l’on en croit la méthode expliquée dans les grimoires, c’est tout à fait absurde.
 

 



 

 

 

 

 

 

 

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