par Gerald Gardner (traduction Ameth)
 

Le fait que je sois le directeur du Musée de la Sorcellerie à Castletown, sur l’Ile de Man, m’a donné l’opportunité de recevoir des courriers du monde entier. Cette correspondance est parfois intéressante, parfois injurieuse (très peu, juste assez pour animer les choses), parfois fantastique, parfois drôle, dans tous les sens du terme.
Cependant, mes correspondants les plus sérieux souhaitent connaître l’origine de la sorcellerie. Ils demandent d’où elle vient ? Ce qui se cache derrière la sorcellerie a obsédé l’esprit des hommes depuis des siècles. Est-ce un culte démoniaque secret ? Une sombre lignée tout au long de l’histoire ? Une irruption du surnaturel dans la vie quotidienne ? Ou, plus simplement, une grosse désillusion ? Quelle est la signification de tout cela ?
Ce sujet a excité l’imagination de bien des écrivains ces dernières années. En gros, on peut diviser ces auteurs en trois catégories. Tout d’abord, les rationalistes, qui pensent que la sorcellerie est une sorte d’hystérie collective liée à des causes psychologiques. Deuxièmement, ceux qui maintiennent que la sorcellerie est réelle et que c’est l’adoration et le culte de Satan dont les sorcières sont les fidèles. Voila l’attitude de certains auteurs prolifiques dont Montague Summers et ses imitateurs. Troisièmement, l’école conduite par des anthropologues, comme le Dr Margaret Murray, qui ont essayé de considérer la question sans peurs superstitieuses, ni arguments théologiques ou incrédulité matérialiste.
Cette école maintient que la sorcellerie est ce qui reste de l’ancienne religion païenne de l’Europe de l’Ouest, dont l’origine remonte à l’Age de Pierre et voila la raison pour laquelle l’Eglise a persécuté ce qui était une dangereuse rivale. Personnellement, j’appartiens à cette troisième école, car ce qu’elle a trouvé correspond à ma propre expérience et parce que c’est la seule théorie plausible lorsqu’on l’examine à la lueur des faits historiques.
Je devrais peut être dire directement ce qu’est cette expérience. Je suis actuellement le Directeur de l’unique musée au monde (à ma connaissance) consacré à la magie et la sorcellerie. J’ai été fonctionnaire en Extrême-Orient (en Malaisie) jusqu’à ma retraite et j’ai rassemblé une grande collection d’instruments magiques, de charmes, etc… . Je suis aussi archéologue et anthropologue et, lors de mes recherches, je me suis intéressé à la place qu’ont joué les croyances magiques pour l’humanité et ce que les gens ont fait à cause de ces croyances.
Lorsque j’étais en Asie, avant de nouer des contacts avec la sorcellerie britannique, je me suis intéressé à la magie des peuplades locales sans trouver quoi que ce soit qui ne puisse s’expliquer par la télépathie, l’hypnotisme, la suggestion ou les coïncidences et, franchement, je considère la magie comme un exemple de choses curieuses auxquelles croient les gens. A cette époque, j’étais très intéressé par la théorie du Dr Margaret Murray selon laquelle la sorcellerie est ce qui reste d’une ancienne religion ; mais, comme toutes les autorités s’accordent à dire, alors qu’il y a des preuves que des gens ont pu être des sorcières, il n’y a pas la moindre preuve que les sorcières aient pu être organisées en coven. Comme Charles Godfrey Leland, qui a rencontré de nombreuses sorcières en Italie et ailleurs et a beaucoup écrit à leur sujet, n’a jamais mentionné aucun coven ou organisation, j’ai considéré la sorcellerie comme quelque chose qui avait pu exister ; mais, même si elle avait effectivement existé, elle a disparu il y a 3OO ans.
Les premiers livres que j’ai lus sur ce sujet semblaient tous d’accord entre eux. Ils disaient que les sorcières ont existé partout et qu’elles étaient des hommes et des femmes. Elles étaient de mauvaises personnes. Elles adoraient le Diable, souvent sous la forme d’un dieu païen (mais alors, tous les dieux païens étaient le Diable). Elles formaient une grande organisation, tenaient des cérémonies religieuses régulières à des dates fixes, avaient une prêtrise avec des prêtres, des prêtresses, des officiants et une forme organisée de religion. Leurs dieux pouvaient être appelés « bon » et le « le Diable » presque dans la même phrase. Cela fut expliqué en disant que tous les Dieux non chrétiens furent réellement des Diables déguisés.
Cependant, à la fin du 17e et au cours du 18e siècle, l’opinion publique semble s’être modifiée. En dépit des idées fortes de John Wesley et d’autres hommes d’église, les gens ne croyaient plus aux sorcières, à tel point que lorsque deux hommes d’églises ont essayé de convaincre un jury que Jane Wenham parlait au Diable sous l’apparence d’un chat et voulaient la condamner à mort pour cela en 1712, les juges ont protesté et elle fut libérée. En 1736, les lois pénales contre la sorcellerie furent abrogées, et je ne pense pas, à part le révérend Montague Summers, que plus personne ne disait sans rire que la sorcellerie existe toujours.



 

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